L’observation des réactions biologiques (c’est à dire réalisées par un micro-organisme) met en évidence que ces réactions peuvent avoir lieu dans deux systèmes différents : – un système dans lequel les micro-organismes sont en suspension dans la phase liquide (qui semble homogène) : c’est le cas des fermentations en œnologie, ou en brasserie. – un système dans lequel les micro-organismes ne sont pas libres mais apparaissent fixés à un support, créant ainsi un système à deux phases distinctes : le procédé d’épuration par lit bactérien peut être un exemple. En œnologie, discipline traditionnelle, le concept de micro-organisme libre domine largement. Par contre dans d’autres domaines, on a, dès les années 60, cherché à fixer les « catalyseurs » de la réaction et les applications industrielles ont rapidement suivi : bactéries adsorbées en vinaigrerie, disques bactériens en épuration… Avant de développer quelques applications œnologiques des micro-organismes immobilisés, nous allons rappeler quel est l’intérêt d’un tel protocole et définir les différentes possibilités techniques existantes. Pourquoi immobiliser les micro-organismes ? L’immobilisation (ou le confinement) des micro-organismes présente plusieurs avantages : – le micro-organisme peut être réutilisé après un cycle de fonctionnement (voir plus loin l’application à la désacidification des moûts). – le micro-organisme n’étant pas dispersé dans le milieu sa récupération en fin de culture est facilitée (voir plus loin l’application à la prise de mousse). – il est possible de mettre en œuvre une population microbienne très importante sans avoir à réaliser la phase de croissance ce qui permet d’accroître les vitesses réactionnelles (voir plus loin l’application au traitement des arrêts de fermentation). Comment immobiliser les micro-organismes ? L’immobilisation ou le confinement des micro-organismes peut être réalisé de différentes méthodes qui découlent pour la plupart de celles proposées initialement par Chibata (1979) pour les enzymes. Trois catégories peuvent être définies. – l’inclusion : ici les cellules microbiennes sont incorporées dans la matrice d’un polymère rigide, le plus utilisé étant l’alginate de calcium (Margaritis et Merchant, 1984). C’est ce procédé (adapté à la réalisation de sphères en double couche et séchées) qui sera développé plus loin. Ce procédé présente l’avantage d’assurer une bonne rétention des micro-organismes dans le gel. – l’adsorption : ici la fixation des micro-organismes au support est lié à la création de liaisons faibles entre la paroi microbienne et le support (bois, brique, pouzzolane…). Un des inconvénients majeurs de cette technique est le risque de désorption, par exemple lors de la mort des micro-organismes. – la rétention des micro-organismes sans support. Cette terminologie regroupe : – les systèmes résultant de l’agglomération spontanée (ou provoquée) des cellules microbiennes. La capacité à la floculation de certaines souches de levures est par exemple mise à profit pour la prise de mousse des vins effervescents. – les procédés visant à confiner les micro-organismes dans une partie du réacteur grâce à une barrière physique, une membrane de micro-filtration en général. En œnologie, une réalisation intéressante était la cartouche « Millispark » développée par Millipore pour la maîtrise de la prise de mousse (Lemonnier et Duteurtre, 1989). Dans ce travail, nous nous limiterons à la présentation des résultats ayant abouti à des réalisations significatives au niveau de la cave. Ils sont issus des travaux menés conjointement par le laboratoire (UMR CNRS 5503) et la société Proenol Lda (Porto) depuis une dizaine d’années. Ces réalisations concernent la prise de mousse tant en méthode traditionnelle qu’en méthode dite ancestrale, la désacidification des moûts ou des vins par Schizosaccharomyces pombe, le traitement des arrêts de fermentation et le contrôle de la fermentation en liquoreux.

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